Mobilité | 19 Mar 2019

Interview de Teddy Woll

L’importance de l’aérodynamique pour les voitures électriques.

TEXTE : MERCEDES-BENZ

Teddy Woll est responsable de l’aérodynamique chez Mercedes-Benz depuis bientôt 20 ans. La soufflerie est, d’une certaine manière, sa deuxième maison. Nous lui avons rendu visite à Sindelfingen, en Allemagne. Il nous explique pourquoi l’aérodynamique est déterminante en cette nouvelle ère de l’électromobilité.

M. Woll, la mobilité électrique n’est plus un projet du futur depuis l’arrivée du Nouvel EQC, le premier modèle commercialisé sous la nouvelle marque « EQ » de Mercedes-Benz : quel rôle joue l’aérodynamique pour les véhicules électriques ?

TEDDY : Il est clair que l’aérodynamique joue un rôle encore plus important qu’avec les moteurs à combustion.

 

Comment cela se fait-il ?

TEDDY : Sur des longs trajets, la traînée est l’élément de résistance le plus important, bien plus que la résistance au roulement ou l’inertie. L’énergie que doit déployer le véhicule pour combattre cette résistance est perdue, et c’est pourquoi une aérodynamique performante est si importante. En circulation urbaine, toutefois, d’autres facteurs entrent en jeu. Là, un véhicule électrique a la faculté de récupérer une bonne partie de l’énergie utilisée lors des freinages, ce qui réduit l’importance de sa masse.

Est-ce la raison pour laquelle les facteurs aérodynamiques gagnent en importance ?

TEDDY : C’est exact. Dans les voitures électriques, le poids du véhicule est moins important du fait de la récupération de l’énergie. Cependant, les pertes irréversibles dans les pneus et avec le déplacement de l’air se remarquent encore plus. Cela signifie qu’une basse résistance au roulement ou à l’aérodynamique donne lieu à une consommation plus basse, et l’autonomie est donc plus longue que dans le cas d’un moteur à combustion.

 

Comment l’aérodynamique influence-t-elle l’autonomie d’une voiture électrique ?

TEDDY : Comparé à un moteur à combustion, qui fonctionne de manière optimale avec des charges élevées, l’efficacité des moteurs électriques diminue avec l’augmentation des charges. Par ailleurs, l’énergie stockée dans une batterie est près de 100 fois plus basse que celle stockée dans un réservoir. Par exemple, le contenu énergétique de 80 kWh de la batterie du Nouvel EQC correspond à 8 litres seulement de carburant conventionnel.

De manière générale, la voiture électrique dispose de nettement moins d’énergie que la voiture à moteur à combustion. Il faut donc optimiser son efficacité dans tous les domaines. Notamment au niveau de la traînée dans les trajets à vitesse constante, comme par exemple sur l’autoroute.

 

C’est à ce moment que l’aérodynamisme entre en jeu...

TEDDY : Exactement ! Comme la résistance de l’air est proportionnelle au carré de la vitesse, il s’agit justement d’une des clés d’une meilleure autonomie : chaque petite amélioration du coefficient de résistance se ressent immédiatement. Plus on roule rapidement, plus il s’améliore. Si vous réduisez le coefficient de résistance d’un centième, l’autonomie augmente de près de 1,3% selon le WLTP. Si vous roulez sur une voie rapide, ce chiffre dépasse même les 2%, voire 3% à des vitesses très élevées.

 

Quelle influence le poids plus élevé du véhicule a-t-il sur l’aérodynamique, et donc sur l’efficacité énergétique ?

TEDDY : En raison du poids élevé du véhicule, nous avons besoin de roues plus grandes et plus larges. Cela rend la voiture plus sportive visuellement mais, malheureusement, cela n’améliore pas le coefficient de résistance. Et la batterie volumineuse, adaptée à l’utilisation quotidienne, implique une surface frontale plus large, si nous voulons proposer au client le même espace que dans une voiture à moteur thermique. Ces deux éléments ne sont pas optimaux pour l’aérodynamique, et donc pour l’efficacité énergétique…

 

À quelles fonctions aérodynamiques recourez-vous pour contrebalancer ceci ?

TEDDY : En tant qu’ingénieur, je dirais que le Nouvel EQC a été développé avec le souci du détail, de la grille du radiateur à l’avant jusqu’aux déflecteurs à l’arrière. Une solution au problème lié aux roues que j’évoquais tout à l’heure a également été trouvée avec l’adoption de nouvelles roues Aero développées spécifiquement pour répondre à ce besoin et dont le design plaît aussi aux designers. Cependant, les roues larges et la batterie dans le soubassement rendent la voiture plus longue et plus large. Étant donné que les places de stationnement ne sont pas seulement limitées en nombre, mais aussi en taille, les porte-à-faux à l’avant et à l’arrière devaien

Comment l’avez-vous relevé ?

TEDDY : Nous nous sommes appuyés sur un avant arrondi avec des feux de brouillard optimisés afin de garantir le meilleur flux possible au niveau du logement des roues à l’avant et sur une poupe joliment rentrée. Le soubassement complètement caréné et parfaitement lisse garantit un passage de l’air optimal. Cet effet est accentué par de nouveaux déflecteurs en 3D assez larges au niveau des roues avant et des déflecteurs spéciaux pour les roues arrière. En outre, le toit est parfaitement dessiné avec un déflecteur de toit et des déflecteurs latéraux prononcés. Un longeron longitudinal spécifique et des marchepieds Aero spéciaux en option viennent compléter les mesures de réduction du coefficient de résistance.

Vous vous chargez non seulement des flux d’air, mais aussi de l’aéroacoustique. Le Nouvel EQC est considéré comme particulièrement silencieux... Pourquoi ?

TEDDY : Les moteurs des véhicules électriques ne produisent pour ainsi dire aucun bruit. Voilà pourquoi le bruit des roues et du vent sont perçus plus clairement, même à basse vitesse. Nous devons donc faire encore plus attention aux zones importantes du point de vue de l’aéroacoustique, telles que les montants A ou les rétroviseurs extérieurs. Il en va de même pour l’isolation. Nous nous sommes chargés des deux pour le Nouvel EQC.

Par exemple, les vitres des portes avant sont équipées de verre feuilleté de sécurité (VSG) couvert d’un film atténuant le bruit. Par rapport au verre de sécurité trempé ordinaire, il réduit significativement le bruit du vent de haute fréquence. Combiné aux améliorations sensibles pour les sons de basse fréquence grâce soubassement caréné, il permet d’obtenir un niveau sonore très harmonieux. Le résultat est un soulagement agréable pour le conducteur.

Découvrez tous les secrets du Nouvel EQC.