She's | 15 Jun 2020

Chercheuse pour l’environnement : Cassia Attard, Canada

Lutte contre le changement climatique : une jeune scientifique veut bousculer le statu quo.

TEXTE : MARKUS HÜFNER // PHOTO : D.R.

Cassia Attard, 18 ans, était l’une des oratrices de la me Convention 2019 à Francfort.

Vous venez à peine de souffler vos 18 bougies et vous vous êtes déjà fait un nom grâce à des projets scientifiques. L’âge est-il important dans le monde des sciences ?

CASSIA ATTARD : La plupart des gens pensent que l’âge est un obstacle. En réalité, c’est l’inverse. Beaucoup d’experts soutiennent volontiers les jeunes qui travaillent sur des problèmes importants. Quand je sollicite des professionnels de l’énergie solaire, la plupart sont ravis de collaborer avec moi.

 

Qu’est-ce qui a éveillé votre intérêt si jeune ?

CASSIA ATTARD : À 15 ans, j’ai passé deux semaines aux Bahamas pour un programme de recherche en biologie marine. On m’y a montré des projets en faveur du développement durable très intéressants. De retour chez moi, j’avais un nouvel objectif : contribuer à résoudre le problème du changement climatique. Plus tard, je me suis aperçue que le changement climatique ne pourrait être freiné qu’à l’aide des technologies. Quand j’ai intégré la Knowledge Society à Toronto, j’ai eu la possibilité de me plonger davantage dans le sujet et d’élargir mes connaissances sur ces technologies en plein essor. J’y ai découvert les points quantiques et j’ai commencé à travailler sur mes propres projets. J’ai mené des expériences pour en fabriquer dans un laboratoire en ville. Ensuite, un partenariat avec les universités de Waterloo et de Toronto m’a permis de transformer mes points quantiques en un panneau solaire transparent.

 

Que sont les points quantiques et quelle est leur utilité dans le domaine de l’énergie solaire ?

CASSIA ATTARD : Actuellement, des obstacles technologiques nous empêchent de graduer l’énergie solaire. J’ai donc effectué des recherches sur des types de capteurs solaires plus efficaces : les cellules photovoltaïques à pérovskites, les nanofils, etc. Et puis j’ai trouvé la solution : les points quantiques ! Il s’agit de nanostructures de semi-conducteurs. Ils sont très petits – leur diamètre est de 50 atomes – et sont capables d’absorber l’énergie lumineuse. Appliqués sur un matériau comme le métal ou le verre, ils peuvent le transformer en panneau solaire tout en étant invisibles. Les panneaux solaires conventionnels ont aujourd’hui une efficacité de 30 % maximum. En plus, la plupart des villes ne disposent pas de suffisamment de place pour en installer à grande échelle dans les zones ensoleillées. Les cellules solaires à points quantiques promettent une efficacité de 68 % et peuvent transformer les fenêtres existantes en panneaux solaires. Imaginez une ville dont les immeubles s’approvisionnent eux-mêmes en énergie grâce à des panneaux solaires « invisibles ». Ce serait vraiment révolutionnaire !

Qu’en est-il de votre projet de « viande in vitro » ?

CASSIA ATTARD : J’ai arrêté de manger de la viande il y a trois ans pour des raisons écologiques. Les exploitations agricoles produisent plus de gaz à effet de serre que tous les moyens de transport réunis !
Je voudrais trouver une alternative à la production de viande. La viande in vitro est fabriquée en laboratoire, mais du point de vue biologique elle est identique à la viande « naturelle ». Sa production nécessite 99 % de surface en moins et 99 % d’eau en moins, et elle émet aussi 99 % de gaz à effet de serre en moins… J’ai hâte de voir la viande de culture s’imposer. Les hamburgers me manquent !

 

Y a-t-il un lien entre vos différents projets ?

CASSIA ATTARD : Selon les études, la production d’énergie et l’agriculture sont les secteurs qui produisent le plus de gaz à effet de serre. Je cherche des technologies qui permettraient de transformer radicalement ces deux secteurs. Les points quantiques et la viande de culture peuvent bouleverser la façon dont nous produisons de l’énergie et de la nourriture.

 

Comment pouvez-vous être si sûre de vous, alors que de nombreux chercheurs renommés ont du mal à trouver des solutions ?

CASSIA ATTARD : J’ai vraiment eu de la chance d’avoir les ressources pour commencer si jeune. Cela me donne une longueur d’avance… Et si je veux trouver des solutions au problème du changement climatique, je ne peux pas attendre d’avoir 30 ans !